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Sébastien Castellion- Israele, terra d' impresa 21/02/2010

Israël, terre dentreprise

 Par Sébastien Castellion

 

 

 

La cause est entendue : limage dIsraël en France comme dans la plus grande partie de lOccident est, sous linfluence de journalistes malintentionnés et dhommes politiques sans courage, presque exclusivement associée à la guerre.

 

 

 

Les Israéliens qui vivent pour lessentiel des vies parfaitement normales où la guerre ne joue, au jour le jour, quun rôle très mineur ont parfaitement raison de trouver cette image injuste.

 

 

 

Mais les tentatives faites pour rectifier cette erreur quelles se concentrent sur les richesses touristiques, sur la vie culturelle israélienne ou, comme récemment en Haïti, sur limportante action humanitaire dIsraël ont eu assez peu de succès jusquà présent.

 

 

 

Richesses touristiques, vie culturelle et action humanitaire sont, après tout, très développées également en Europe. Israël fait bien de rappeler ses avantages en ces matières, mais ne parviendra pas à impressionner pour autant les opinions européennes.

 

 

 

Cest pourquoi le récent livre de Dan Senor et Saul Singer Start-up Nation, "Council on Foreign Relations", 2009, mérite une mention à part. En se penchant sur le phénomène de la création dentreprises en Israël, les auteurs ont identifié un domaine où la société israélienne écrase ses concurrentes européennes dune supériorité incontestable.

 

 

 

Quelques chiffres et quelques faits pour commencer :

 

 

 

Israël, dont la population est soixante fois plus faible que celle de lUnion européenne, attire à elle seule la moitié du montant du capital risque investi dans lensemble des économies européennes un ratio par habitant de 30 contre 1 en faveur dIsraël.

 

 

 

Sur le marché boursier Nasdaq, spécialisé dans les entreprises de petite taille et de haute technologie, on trouve plus dentreprises israéliennes que dentreprises issues de lensemble du continent européen.

 

 

 

Avec des dépenses de recherche et développement égales à 4,5% de la production annuelle de richesse, Israël est le numéro un mondial de leffort de recherche par habitant. Du coup, Israël se place chaque année dans le peloton de tête des pays classés par le nombre des brevets déposés.

 

 

 

Contrairement à ce que certains croient encore, les industries civiles représentent la très grande majorité de ce mouvement dinnovation. Lindustrie militaire, au sens large, (défense, sécurité et anti-terrorisme) représente désormais moins de 5% de la richesse produite annuellement en Israël.

 

 

 

Outre la sécurité, les points forts de linnovation israélienne comprennent linformatique, les communications, les équipements médicaux, les biotechnologies et lenvironnement.

 

 

 

Plusieurs des grandes entreprises de nouvelles technologies eBay, Cisco, Intel, Microsoft, Google ont localisé en Israël les programmes les plus innovants de leur effort de recherche-développement. Un des dirigeants américains deBay, interviewé par Senor et Singer, déclare que « le secret le mieux gardé de la profession est que nous vivons et mourons par la production de nos équipes israéliennes ».

 

 

 

Parmi les innovations made in Israel, on trouve la puce Duo Intel, les pilules à caméra intégrées, utilisées par la médecine, le téléphone portable, le système de recherche de Google, les dernières versions de Microsoft Outlook, le système de détection de fraudes en ligne utilisé par Paypal, etc., etc.

 

 

 

Enfin, la situation dIsraël en matière dinnovation et de capital-risque ne sest pas détériorée du fait de la guerre, au contraire : au cours de la décennie 2000 celle de la deuxième Intifada et des guerres du Liban et de Gaza la part dIsraël dans le marché du capital risque a doublé.

 

 

 

Toutes ces données convergent : en matière de création dentreprises et dinnovation technique, Israël a manifestement trouvé un modèle qui en fait lun des pays les plus performants du monde dans une catégorie incomparablement supérieure à celle des sociétés dEurope.

 

 

 

Ce succès peut paraître dautant plus surprenant, quIsraël fut longtemps un pays pauvre, dominé par des idées socialistes, tout occupé à gérer lintégration de ses nouveaux immigrants et à protéger son existence contre ses ennemis. La plus grande partie des immigrants ne venait pas, par ailleurs, de cultures particulièrement portées sur lentreprise.

 

 

 

Quelle est donc lexplication de ce miracle israélien dans lentreprise et linnovation ? Senor et Singer étudient la question selon une méthode presque anthropologique, analysant plusieurs caractéristiques de la société israélienne pour comprendre leur impact sur lesprit dentreprise et dinnovation.

 

 

 

Israël vu par lentreprise : un point de vue unique et impressionnant

 

 

 

La première explication du succès israélien est, pour les auteurs, le caractère faiblement hiérarchique de la société israélienne. Tous ceux qui ont visité le pays le savent : les Israéliens naccordent aucun respect particulier à ceux qui détiennent lautorité, de linstituteur au Premier ministre. Ils nhésitent pas à les critiquer ouvertement et, sils ne sont pas daccord avec eux, à le leur dire en face.

 

 

 

Cette liberté de ton est, selon Senor et Singer, directement favorable aux succès des entreprises. Dans dautres sociétés, les employés nosent pas faire part de leurs désaccords et obéissent aux ordres du chef, même sils savent que ces ordres vont nuire à lentreprise.

 

 

 

En Israël, ils protestent, lancent le débat et peuvent ainsi contribuer à sauver une entreprise qui, sans ce débat, serait allée à sa perte.

 

 

 

En plus de cette liberté de parole, sans doute unique au monde, de nombreux Israéliens partagent lexpérience davoir été chargés de lourdes responsabilités, à un très jeune âge, lors de leur service militaire.

 

 

 

Des officiers de vingt-deux ou vingt-trois ans doivent diriger des opérations complexes, où sont en jeu la destruction dennemis dangereux, la vie des populations civiles et celle de leurs subordonnés. Si éprouvantes que soient ces expériences, elles sont aussi une formation exceptionnelle pour exercer des fonctions de direction et tenir bon face aux tensions du monde économique.

 

 

 

La petite taille du pays, son caractère antihiérarchique et le grand brassage social du service militaire font également dIsraël un pays idéal pour la constitution des réseaux, qui sont si indispensables pour la création et le développement des entreprises.

 

 

 

Comme le dit aux auteurs Yossi Vardi, créateur et financeur en série dentreprises israéliennes de lInternet : « Le schéma des relations sociales en Israël est simple : tout le monde connaît tout le monde, tout le monde a été à larmée avec le frère de tout le monde, la mère de tout le monde était professeur dans votre école et son oncle était votre commandant ». Dans une société où les réseaux sont aussi denses, il est plus facile didentifier les talents et de trouver les partenaires nécessaires pour faire fructifier son entreprise.

 

 

 

Prête à reconnaître et à développer tous les talents en son sein, Israël est aussi plus ouverte que tout autre pays pour faire venir de nouveaux talents de létranger.

 

 

 

Les Juifs du monde qui souhaitent sy installer pour affaires sont incités à rester et à faire leur vie dans le pays. Il en est résulté un afflux de talents extérieurs avec lequel seuls les Etats-Unis (et peut-être le Canada) peuvent être comparés.

 

 

 

Les raisons du succès ne résident cependant pas entièrement dans la société civile : Senor et Singer reconnaissent un rôle à lEtat dans le développement des entreprises.

 

 

 

LEtat israélien avait créé, au début des années 1990, un programme public de financement du capital-risque, Yozma, dont limportance a décru depuis lors, mais à qui plusieurs interlocuteurs des deux auteurs attribuent le lancement de linnovation israélienne.

 

 

 

Et surtout, afin de mieux défendre la nation, lEtat dIsraël a mis en place des programmes de repérage et de formation des meilleurs étudiants pour les faire servir dans des unités militaires délite à forte composante scientifique : Talpiot au sommet, Mamram chargée des systèmes informatiques, lunité 8200, qui poursuit les terroristes en suivant leur activité sur Internet

 

 

 

Ces formations de premier rang, financées par lEtat, créent une exceptionnelle concentration de talents qui, une fois larmée terminée, se déversent dans lentreprise.

 

 

 

Cette combinaison de facteurs favorables dans la société et dune aide intelligente de lEtat ne signifie pas que le modèle israélien ne coure aucun risque. Les auteurs identifient, comme risque principal, la part croissante de la population israélienne qui ne participe pas activement à léconomie


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