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La casa del pascià Capitolo VI 06/11/2008
la stampa egiziana raccontata da Michelle Mazel
Pubblichiamo dal libro di Michelle Mazel "La maison du Pacha", pubblicato solo in ebraico, il capitolo VI, dedicato alla stampa egiziana

Pourquoi consacrer un chapitre à la presse égyptienne dans ces souvenirs personnels ?. Tout simplement parce qu’il serait impossible autrement d’expliquer l’ambiance dans laquelle nous avons vécu et la réaction du peuple égyptien à l’actualité quotidienne dans notre région. C’est pourquoi je voudrais m’étendre longuement sur la façon dont on parle d’Israël et des Juifs dans ce grand pays voisin avec lequel nous avons fait la paix il y a plus de vingt ans. Mais d’abord, je voudrais revenir sur la raison pour laquelle j’ai consacré personnellement tant de temps à la lecture de la presse alors que je n’occupais aucune fonction à l’ambassade et n’en avait théoriquement nul besoin. Un très grand nombre d’étrangers vivant en Egypte déclarent ouvertement ne jamais ouvrir un journal égyptien, pas même en anglais ou en français. Tout au plus achètent-ils l’un des nombreux mensuels en langue anglaise aujourd’hui disponibles – Egypt Today, Reporter, Insight – qui proposent sur papier glacé des reportages parfaitement neutres sur l’artisanat ou le tourisme accompagnés de luxueux encadrés publicitaires. Ces mêmes personnes reconnaissent ne jamais regarder les nouvelles à la télévision égyptienne, là encore même en anglais ; les uns et les autres se contentant des journaux qu’ils reçoivent de chez eux une ou deux fois par semaine et des émissions de la CNN ou de leurs télévisions respectives. Il est en effet possible aujourd’hui de regarder par exemple la télévision israélienne en direct grâce aux antennes paraboliques et on peut depuis toujours écouter la radio israélienne au Caire sans difficultés ; qui plus est les grands quotidiens israéliens et leurs équivalents français, américains ou autres sont désormais disponibles sur l’internet le jour même de leur parution Dans ces conditions, pourquoi perdre son temps à lire la presse locale ? Je l’avoue : une telle attitude est pour moi incompréhensible. Comment peut-on passer des mois, des années, dans un pays sans chercher à comprendre ce qui préoccupe les gens et sans se soucier de ce qui s’y passe ? Qui ne lit pas les journaux n’est pas au courant des faits divers dont tout le monde parle : un train qui déraille, un avion qui s’écrase, un incendie catastrophique dans une école ou un grand magasin, un immeuble qui s’est écroulé faisant morts et blessés ou tout simplement un grave accident de la route. Combien de fois ais-je assisté à cette scène embarrassante : un petit groupe d’Egyptiens, la mine grave, discutent dans une réception la dernière catastrophe intervenue ce jour là et qui a fait de nombreux morts – alors que tel ou tel diplomate ou expert étranger venu rejoindre le groupe ne peut cacher son ignorance totale de l’événement. Sans parler des grandes affaires qui défrayent la chronique – procès retentissant, débats au parlement sur une modification à la loi régissant la protection des locataires dans les immeubles anciens par exemple - et qui font l’objet de discussions passionnées. Beaucoup d’Egyptiens voient dans cette ignorance la marque d’un certain manque d’intérêt, pour ne pas dire mépris, concernant l’Egypte et son peuple. Pourtant l’Egypte offre à ses hôtes étrangers deux quotidiens : l’un, en anglais, « The Egyptian Gazette » - notre vielle amie la gazette égyptienne – l’autre, en français « Le Progrès Egyptien ». Ces deux vénérables journaux – la Gazette fut fondée en 1880, le Progrès en 1893 - paraissent qui plus est pratiquement tous les jours de l’année, dimanche compris, le premier prenant alors le nom « d’Egyptian Mail » et le second du « Progrès du Dimanche ». C’est tout juste s’ils s’accordent une dizaine de jours de repos par an à l’occasion du début et de la fin des grandes fêtes musulmanes et du premier janvier. (Les journaux en langue arabe, employant un personnel pléthorique qui leur permet d’effectuer un roulement, ne prennent pas un seul jour de congé par an ). La Gazette et le Progrès ne sont pas de bons journaux ; on peut même dire que ce sont de fort mauvaises feuilles de choux. Pourtant ils donnent en huit pages l’essentiel de l’actualité du pays et du monde. Il ne faut pas y chercher d’originalité ; leurs articles sont tirés de dépêches de presse données plus ou moins telles quelles ou, pour l’essentiel, reprennent en les résumant des articles parus dans la presse en langue arabe. Mais ces articles, ces dépêches sont soigneusement choisis, même si les raisons de ces choix ne sont pas toujours évidentes. Pour le reste, ces deux quotidiens appartiennent au même groupe d’édition, celui du Gomhurrya, « La République » du nom du quotidien en langue arabe qui en est le chef de file . C’est le second groupe de presse égyptien après le groupe Al Ahram « Les Pyramides », là encore nommé après son quotidien éponyme. Il est suivi par le groupe Al Ahkbar, « Les Nouvelles » Tous trois appartiennent au gouvernement égyptien qui en nomme les présidents respectifs. C’est Monsieur Samir Ragab qui est aujourd’hui à la tête du groupe Goumhurya. Ami personnel du président Moubarak, il est l’auteur d’un livre à succès « Mes conversations avec le président », lauréat du prix…. Moubarak. Ses éditoriaux contre Israël et contre les Juifs, paraissant dans le quotidien en arabe, sont traduits fidèlement dans la « Gazette » et dans le « Progrès ».. Le hasard a voulu qu’il soit placé un jour à la même table que l’ambassadeur d’Israël lors d’un grand dîner offert par le ministre du tourisme sur le plateau de Giza qu pied des Pyramides dans le cadre d’une rencontre internationale. Arrivant à la table et reconnaissant ledit ambassadeur, qui était déjà assis, il recula immédiatement et demanda à être assis ailleurs. Cela s’est passé en 1998, bien avant l’intifada. Le patron d’un groupe public de presse appartenant à l’Etat ne veut pas être assis à côté de l’ambassadeur d’un pays qui est en paix avec l’Egypte, et ne se préoccupe pas du manque de courtoisie qu’il y a dans cette volte-face remarquée. C’est en 1980, lors de mon premier séjour, que j’avais fait la connaissance de ces deux quotidiens. Je les lisais tous les matins pendant que Zvi se consacrait à la presse en langue arabe. A l’époque, la télévision israélienne n’était pas encore retransmise par satellite et j’en étais souvent réduite à suivre les nouvelles en français ou en anglais à la télévision égyptienne qui diffusait de courts bulletins en ces deux langues. J’en ai gardé un bon souvenir. Il n’y avait pas ou peu d’attaques contre Israël et surtout le style un peu archaïque adopté par les rédacteurs des deux journaux donnait parfois lieu à des coquilles réjouissantes mais malheureusement intraduisibles en hébreu. Là encore, j’ai été confrontée en 1996 à une réalité toute différente. D’une part, le pays avait été catapulté dans le monde moderne : toutes les nouvelles étaient disponibles à tout moment et en temps réel sur l’internet ou sur les chaînes de télévision désormais accessibles grâce aux antennes paraboliques que l’on pouvait voir un peu partout sur les toits. Telle une fleur gigantesque, une antenne de près de deux mètres de diamètre s’épanouissait sur le toit de la maison du Pacha à Maadi. Elle permettait de voir plus de cent chaînes arabes face aux trois chaînes officielles de l’Etat d’Israël. Grâce à une floraison de nouveaux titres en anglais dans la presse locale les étrangers pouvaient se tenir mieux que jamais au fait de ce qui se passait en Egypte. Le groupe Al Ahram publiait désormais un hebdomadaire en langue anglaise, « Al Ahram Weekly » et un second, en français, « Al Ahram Hebdo » ; on y trouvait les commentaires des ténors de la presse égyptienne parus dans les journaux en langue arabe du groupe sur la vie politique en Egypte et sur le conflit israélo-palestinien. Par ailleurs, deux hebdomadaires « indépendants » avaient fait leur apparition ou la firent peu après notre arrivée : « Middle East Times » et « Cairo Times ». Bien que n’étant pas financièrement dépendants du gouvernement égyptien, ces derniers, étant soumis à la censure qui en suspendit plus d’une fois la diffusion, devaient quand même faire très attention à ce qu’ils publiaient pour éviter d’être saisis ou interdits purement ou simplement. Ceci dit, il n’en reste pas moins que le lecteur ne comprenant pas l’arabe disposait pour la première fois de suffisamment d’informations pour savoir ce qui se passait en Egypte et la ligne officielle à ce sujet. Je dirais qu’indépendamment des deux questions qui me préoccupaient essentiellement – Israël et l’antisémitisme – et dont il va être longuement question plus loin, la lecture de la presse est à mon sens pratiquement le seul moyen dont disposent les étrangers pour chercher à comprendre l’Egypte. En effet, la presse est en quelque sorte un prisme à travers lequel il est possible de voir la réalité du pays. Non pas le petit monde clos accessible aux diplomates et aux hommes d’affaires, qui ne rencontrent que l’élite égyptienne dans un cadre généralement occidentalisé, mais la réalité concernant l’immense majorité des plus de soixante millions d’habitants que compte aujourd’hui officiellement l’Egypte. A travers les faits divers présentés tels quels dans la presse on rencontre quotidiennement la grande pauvreté et l’immense détresse d’un peuple vivant à la limite de la subsistance. On prend aussi la mesure d’un code de vie reposant sur des principes moraux et religieux fort différents des nôtres. Dans les campagnes et en Haute Egypte, l’analphabétisme atteint des proportions effrayantes, dépassant officiellement 60 pour cent chez les hommes. Ne parlons pas des femmes, encore plus défavorisées sur ce plan. Il y a donc des millions de gens qui n’ont jamais été à l’école, jamais reçu d’éducation mis à part l’apprentissage du Coran. Inutile de dire qu’ils ne savent rien d’Israël que ce qu’ils en entendent à la radio ou ce qu’ils voient à la télévision ; quant aux Juifs, ils ne connaissent d’eux que ce qu’en dit le Coran, qui comme on le sait n’est pas tendre pour ceux qu’il accuse d’avoir trahit Mahomet. Le revenu annuel par tête d’habitant s’établit autour de 1300 dollars, donc bien moins pour les familles les plus déshéritées. Il n’est malheureusement pas rare de lire qu’un homme, une femme ou parfois un adolescent, a assassiné la fillette de quatre ans des voisins – pour lui voler ses petites boucles d’oreille en or pour les revendre moyennant une somme généralement inférieure à cinquante livres égyptiennes – un peu plus de dix dollars au cours actuel. Un fils tuera sa mère pour lui prendre ses maigres économies, seul moyen pour lui de d’arriver à payer le pas de porte lui permettant de prendre un appartement en location et donc de se marier. Des dizaines de milliers de jeunes égyptiens restent en effet célibataires, de longues années faute de pouvoir accéder à un logement et l’âge moyen du mariage dans les villes ne cesse d’augmenter. Dans ce pays traditionaliste, une autre statistique officielle : plus de la moitié des viols sont commis par des jeunes qui n’avaient jamais eu d’expérience sexuelle auparavant A ce niveau de misère, la criminalité est omniprésente, la corruption effrayante – faut-il préciser que les policiers non gradés gagnent moins de cinquante Euros par mois - et le petit peuple, ignorant par la force des choses et pétri de superstition ne croit plus en rien ni en personne. Il s’accroche à la seule chose qui lui reste, sa fierté, sa réputation. Un mari n’hésitera pas à tuer sa femme parce que « on » l’a vue en compagnie d’un autre ; un adolescent étranglera le gamin de trois ans de la voisine parce que cette dernière a mal parlé à sa mère à lui. Ces crimes monstrueux sont accompagnés de la plus grande naïveté et les assassins sont rapidement découverts. Non pas tellement grâce à l’efficacité de la police mais plutôt à travers l’immense réseau d’indics recrutés dans chaque village, dans chaque maison…. Cette réalité est bien connue des Egyptiens avec lesquels nous sommes en contact. Tous ou presque tous ont gardé des attaches à la campagne, y ont de la famille ou des terres, tous ont des domestiques issus des couches les plus pauvres. Pourtant ils n’en parlent jamais - en tout cas pas devant les étrangers - c’est là encore une question de fierté… Il existe un deuxième point qui mérite d’être souligné. Si la presse égyptienne est pour les étrangers un instrument essentiel pour aller à la découverte de l’Egypte, c’est également à travers cette presse, mais en langue arabe et assortie cette fois de la radio et de la télévision, que les Egyptiens découvrent le reste du monde, d’où sa seconde importance pour moi. La façon dont tel ou tel fait est présenté est déterminante, la plupart des gens n’allant pas chercher plus loin. Pour en revenir au peuple, il ne sait de ce qui se passe dans le reste du monde que ce qu’il entend à la radio ou voit à la télévision – toutes deux entièrement contrôlées par l’Etat ; et le vendredi dans les mosquées le sermon hebdomadaire va lui apprendre ce qu’il doit en penser. Là encore les prédicateurs sont étroitement contrôlés par l’état mais ce dernier, concernant Israël, ne les pousse pas à la modération. L’homme de la rue ne dispose d’aucun moyen de vérification indépendant ou semi-indépendant quand bien même il voudrait en savoir plus. Il peut donc être manipulé très facilement et rien de plus simple que de provoquer des manifestations « spontanées » y compris au sein des enfants des écoles qu’un lavage de cerveau bien fait peut jeter dans la rue pour aller manifester contre les méchants israéliens et leurs suppôts juifs comme on le verra dans l’affaire des supermarchés Sainsbury. Quant à la bourgeoisie et à l’élite, qui a accès, elle, à la presse internationale, elle ne le fait pas toujours, peu soucieuse d’aller contre la ligne officielle. Dans la plupart des discussions, les étrangers sont confrontés à la vérité telle qu’elle est présentée dans la presse égyptienne et c’est particulièrement vrai concernant Israël, peu d’Egyptiens se donnant la peine d’écouter la radio israélienne qui diffuse pourtant des programmes en langue arabe. Cette vérité littéralement incontournable m’a accompagnée pendant tout mon séjour. Il est quasiment impossible de convaincre un Egyptien qu’une information. publiée au Caire est mensongère ou dénuée de tout fondement. Ainsi je n’ai jamais réussi à convaincre qui que ce soit que le tunnel asmonéen qui longe le mur des Lamentations vers le nord-est et débouche sous le monastère des Sœurs de Sion dans la Via Dolorosa ne passe pas sous la mosquée Al Aqsa laquelle est située à l’extrémité sud de l’esplanade du Temple, et ne s’en approche même pas. L’ouverture d’une deuxième issue à ce tunnel avait pourtant donné lieu à des manifestations et à des appels à sauver ladite mosquée dont le tunnel menacerait la stabilité. C’est frustrant, je le reconnais et j’ai souvent regretté que l’Etat d’Israël ne consacre pas plus d’émissions à l’intention des publics arabophones du Moyen-Orient.. Par ailleurs il est rarissime de voir un diplomate étranger intervenir au cours d’une discussion pour confirmer tel ou tel fait – si évident soit il - mentionné par un israélien et disputé par son interlocuteur égyptien. En résumé, on peut dire sans craindre de se tromper que si les étrangers, dans leur grande majorité, ne comprennent pas la société égyptienne, cette dernière, dans sa grande majorité à elle, le leur rend bien. La communication entre les uns et les autres se fait grâce à une étroite bande de consensus ou de tolérance aux points de contact, entre ces deux catégories, chacun rentrant souvent ensuite chez soi en secouant la tête à la pensée de la bizarrerie de l’autre. Tout ceci n’a pas trop d’importance pour la communauté anglaise, américaine ou française en Egypte. Venus passer deux ou trois ans en tant qu’hommes d’affaires, assistants techniques ou diplomates dans un pays d’une beauté grandiose et dans l’ensemble hospitalier, les membres des dites communautés n’en ont cure. Il n’en est pas de même pour nous autres Israéliens. Ce n’est pas seulement que nous aimons être aimés ou pour le moins compris. C’est que l’ignorance dans le meilleur des cas et le parti pris dans le pire nous rend la vie difficile sinon parfois impossible et freine considérablement toute tentative pour promouvoir une meilleure compréhension. Et je ne parle pas ici de notre dernière année en Egypte, l’année de l’Intifada. Le problème est bien antérieur. Je ne peux pas analyser ici les raisons et les étapes qui ont fait que la presse modérément critique de 1980 était devenue massivement hostile en 1996. Je ne peux que constater que dans cette ambiance de méfiance et de haine – le mot n’est pas trop fort - à peine déguisée, les rumeurs les plus folles se propagent avec la rapidité de l’éclair sans que quiconque ne vienne y mettre le haut-là. . En voici quelques exemples. Le quotidien « Al Ahram » publia en 1997 un article accusant les soldats israéliens de pratiquer une politique délibérée consistant à inoculer le Sida aux enfants palestiniens. C’était tellement gros que la vigoureuse protestation officielle de l’ambassadeur d’Israël – Zvi Mazel en l’occurrence – fut entendue et que pour la première – et sans doute la dernière fois de son histoire - le quotidien publia un rectificatif en premier page. Inutile de dire qu’entre temps une soixantaine de publications avaient repris la nouvelle en citant « Al Ahram » et qu’aucune d’entre elles n’éprouva le besoin de rectifier à son tour. Deux ans plus tard, un autre journal écrivit qu’Israël vendait cyniquement aux Arabes du sang contaminé en toute connaissance de cause. La Gazette s’en fit tout naturellement l’écho. Cette fois la protestation de Zvi amena le ministère égyptien de la santé à publier un communiqué disant à peu près ceci : « Comme il ne nous viendrait jamais à l’idée d’acheter du sang à Israël, le public égyptien n’a pas d’inquiétude à se faire concernant le sang contaminé vendu… » Cette question de sang contaminé exerçait une véritable fascination sur le public égyptien et elle refit surface à intervalle régulier pendant tout notre séjour au travers d’une myriade d’articles. Dans le même ordre d’idée, l’hebdomadaire « Usbua » - La Semaine, indépendant mais proche du pouvoir – publia au printemps 1999 une information sensationnelle : le Mossad israélien venait d’exécuter 17 de ses propres agentes. Selon le journal, ces jeunes femmes, dont la mission avait été de propager le sida au sein de la jeunesse égyptienne, étaient désormais trop gravement atteintes pour pouvoir continuer leur travail et le Mossad avait donc préféré s’en débarrasser. Rencontrant ce jour là dans un cocktail un professeur égyptien à l’Université américaine, un homme à l’esprit ouvert qui avait passé plusieurs années aux Etats-Unis et avec lequel nous avions sympathisés Zvi et moi, je lui demandais comment il était possible de publier de pareilles insanités. Le professeur me regarda gravement et hocha la tête : « Vous avez raison » me dit-il. « Même si c’est vrai, le journal n’aurait pas du le publier. » Autre accusation parue elle dans des journaux de second plan, mais apparemment très répandue dans le public : Israël vendrait à l’Egypte des chewing-gums trafiqués dans lesquels auraient été introduits de dangereux produits chimiques à caractère érotogène – dans le but de renforcer la libido des jeunes pour les inciter à la débauche et amener ainsi la destruction de la société égyptienne. Dans le même esprit, Israël fut accusé d’exporter en Egypte des boucles de ceinture de sécurité radioactives afin de porter atteinte à la virilité des mâles égyptiens et les rendre ainsi incapables de procréer. « Soyons sérieux », allez-vous me dire. « Qui pourrait croire à ce genre de bêtises? » Et bien les membres du « Magless es Shaab », l’Assemblée du Peuple, qui est la chambre basse du parlement égyptien. Cette honorable institution consacra de longs débats au rôle d’Israël dans l’introduction des boucles de ceinture suspectes au cours du mois de juin 2001, et la Gazette, qui en fait état dans son numéro du 10 de ce mois commente ainsi l’affaire : « Depuis la signature du traité de paix entre l’Egypte et Israël en 1979, l’Etat juif a été suspecté de mener une sale guerre non déclarée contre l’Egypte. Ses armes sont la drogue, la fausse monnaie, du chewing-gum qui est un stimulant sexuel et même le Sida. » Quoi d’étonnant donc à ce que ce. genre de ragots descende de l’hémicycle pour être discuté avec sérieux et indignation dans les cafés et les bazars où toute question touchant à la virilité de ces messieurs prend des allures d’affaire d’état ? Plus insolite mais ô combien typique est l’histoire des belles israéliennes s’entraînant dans des écoles spéciales afin de séduire les bédouins du Néguev ( Je me suis toujours demandé pourquoi il était nécessaire de suivre des cours à cet effet, la séduction des bédouins ne devant pas à priori demander tant de sophistication). Mais pourquoi diable vouloir séduire les bédouins, demanderez-vous. Et bien, pour se faire faire un enfant, voyons. Question suivante, pourquoi ces belles israéliennes voudraient-elles donc se faire faire un enfant par un bédouin ? La réponse est non moins évidente : selon la loi égyptienne, si le père est égyptien, l’enfant a automatiquement la nationalité égyptienne ; or, selon la loi israélienne, si la mère est juive l’enfant est juif et a donc droit à la nationalité israélienne. Donc, le fruit de cette union, étant égyptien par son père, pourra hériter de ses biens, y compris de ses terres, et comme il sera aussi israélien par sa mère, Israël pourra revendiquer lesdites terres et étendre son emprise sur le Sinaï.. « Soyons sérieux, direz-vous encore, qui écoute ce genre de sornettes ? Cette fois-ci c’est trop gros. » Et bien selon notre chère Gazette égyptienne - qui ne fait que reprendre une série d’articles publiés dans la presse en langue arabe dans le courant de l’été de 1997 - le gouverneur du Sinaï du Sud en personne, un certain général Mustafa Afif, lequel se serait déclaré très inquiet par cette insidieuse politique israélienne. Des dizaines de bébés seraient déjà nés de ces unions contre nature. La Gazette consacre un long article de première page le 10 août 1997 à ce « nouveau et sinistre complot sioniste dont les sombres et dramatiques conséquences se feront sentir dans un avenir pas très lointain » et lance un avertissement solennel : « La situation est si grave que son impact serait catastrophique pour l’avenir si le gouvernement n’agissait pas. » Peu de temps, après l’assemblée nationale consacrait de longs débats à la question de savoir s’il fallait priver de la nationalité égyptienne les enfants issus d’un père égyptien et d’une mère de nationalité israélienne. Il n’est peut-être pas inutile de préciser que si le nombre d’israéliennes de confession juive épousant des musulmans égyptiens avoisine le zéro, de telles unions entre Egyptiens et Arabes israéliennes ne sont pas rares et la loi dont il était question aurait privé des enfants musulmans et arabes de père et de mère de la nationalité égyptienne au seul motif que leur mère avait un passeport israélien. Comment peut-on, vingt ans après l’établissement de la paix entre Israël et l’Egypte, traiter ainsi les Israéliennes comme des ennemies ? Parallèlement, les plus hautes autorités religieuses de l’Egypte se divisaient sur la légitimité d’un mariage entre un musulman et une juive, et la Gazette (10/4/2001) rapporte que le cheikh Tantawi, président de la prestigieuse institution Al Azhar, est très critiqué parce qu’il continue à déclarer que ces unions ne sont pas interdites par le Coran, tandis que Farid Wassel ; le grand mufti d’Egypte, se prononçait pour leur interdiction totale. « les femmes juives pouvant faire usage du statut social que leur donne leur qualité de femmes de musulmans pour pratiquer l’espionnage au profit d’Israël ». Notons que ces deux hauts dignitaires religieux sont nommés l’un comme l’autre par le gouvernement. Notons aussi qu’aucun gouvernement et qu’aucun journal étranger n’a protesté contre cette forme scandaleuse de racisme. Pour comprendre un peu mieux la préoccupation égyptienne concernant des prétendues visées israéliennes sur le sud du Sinaï, il faut savoir que, jusqu’à la fin de septembre 2000 – date du début de l’intifada dite Al Aksa – près d’un demi-million d’Israéliens venaient chaque année passer des vacances sur la côte du Sinaï au sud de Taba en bordure de la Mer rouge. Ils étaient attirés par la beauté du paysage, les possibilités de tourisme populaire et le fait qu’en vertu du traité de paix entre Israël et l’Egypte, aucun visa n’est nécessaire pour pénétrer dans le Sinaï jusqu’à Sharm es Sheikh. Aux alentours des fêtes du Nouvel An juif et jusqu’à Sukkot – la fête des Tabernacles - de longues files d’Israéliens se pressaient ainsi au poste frontière de Taba qu’il fallait parfois plusieurs heures pour franchir. En octobre 1998, la presse égyptienne s’intéressa à ce phénomène et la Gazette – toujours elle - reprend à l’intention de ses lecteurs étrangers l’essentiel d’un article de fond paru dans l’hebdomadaire à grand tirage « Roz el Youssef » pour expliquer à ses lecteurs la raison de l’arrivée massive des Israéliens à cette saison. Le titre : « Les Israéliens viennent se lamenter sur la perte du Sinaï ». (Egyptian Gazette, 17 octobre 1998). Ecoutons : « Les Egyptiens célèbrent le 25ème anniversaire de la victoire d’octobre et curieusement les Israéliens célèbrent aussi cet événement qui marque leur défaite humiliante. Paradoxalement, ils viennent le célébrer au Sinaï qui fut le théâtre de leur première fuite devant les pharaons ( !) ainsi que le théâtre de la destruction du mythe de leur suprématie militaire…… Yom Kipour est le plus important des événements qu’ils célèbrent au Sinaï et parmi les rites bizarres qu’ils pratiquent durant ces célébrations, ils allument des cierges, mangent des pommes et s’abstiennent de parler – en signe de deuil à la perte du Sinaï. Durant les quatre jours de célébration qui marquent le nouvel an hébraïque, ils passent deux journées à visiter des lieux saints ; le troisième, ils se dirigent vers les villages touristiques et passent la journée sur la plage et la nuit à faire la fête. Le quatrième jour est « Yom Gedalia » (sic ). Ils jeûnent toute la journée et font preuve d’une grande tristesse ». Ce qui est proprement effarant ici c’est que les journaux ne parlent pas d’une tribu exotique et peu connue venant du fin fond de l’Asie ou de l’Afrique. Il s’agit du peuple juif, peuple dont les liens avec l’Egypte remontent à la plus haute antiquité ; il s’agit aussi des citoyens de l’Etat d’Israël, un Etat qui se trouve tout juste de l’autre côté de la frontière. Alors comment expliquer une ignorance aussi totale ? D’autant que c’est l’époque de l’année où la presse israélienne consacre de longs développements aux fêtes. Par ailleurs, on aura noté au passage la « fuite devant les pharaons », éclairage nouveau sur le thème de l’Exode souvent repris par la presse égyptienne qui évoque volontiers « l’expulsion des Juifs » par Ramsés II. Un éditorial du quotidien « Al Ahram » cité par la Gazette (23/4/2001) explique savamment que « Les attaques israéliennes contre les Arabes semblent s’intensifier durant le mois d’avril. Certains analystes expliquent ce phénomène par le sentiment de dépression ressenti par la diaspora depuis que les Israélites furent exilés d’Egypte le jour de Pâques, qui était le 15 avril ». (Rien d’étonnant donc à ce que le film « Prince d’Egypte » n’ait jamais été projeté en Egypte : le peuple de ce pays n’aurait pas compris un récit faisant état de la victoire du dieu des Hébreux sur les divinités égyptiennes et la destruction de l’armée du pharaon). Et puisque nous sommes dans la réécriture de l’histoire, encore deux morceaux de choix. Un éditorial du quotidien en langue arabe Al Gomhurya déclare sans rire : « D’un point de vue historique, le judaïsme est né après le christianisme et l’Islam. » ( 9/7/1997) et plus près de nous, un digne professeur à l’université de Suez soutient que la mosquée Al Aqsa a été construite mille ans avant le temple de Salomon. De mille façons insidieuses le tableau que présente la presse égyptienne est donc celui d’un peuple sournois et sanguinaire qui consacre toute son énergie à faire du tort à l’Egypte par tous les moyens, ne reculant devant aucune infamie. Quoi d’étonnant là encore à ce qu’une longue série de films viennent présenter à ceux des Egyptiens qui ne savent pas lire cette même image ? Jeune égyptien naïf tombant dans le piège que lui tend une belle israélienne sans merci ( « L’amour à Taba », 1992) ou sinistre et douteux personnage dont la fille cherche à séduire un étudiant égyptien qui est sauvé par son père. Ce dernier, qui a toujours une citation des « Protocoles des Sages de Sion » appropriée à la bouche, se lave les mains après avoir été forcé de serrer la main de l’israélien et l’eau coule rouge dans le lavabo. (« Une fille venue d’Israël », 2000). Dans cette atmosphère de démonisation – je ne trouve pas d’autre mot – délibérée, aucune accusation contre Israël n’est jugée trop invraisemblable ou trop grosse. Des lettres piégées sont arrivées aux Etats-Unis et semblent avoir été expédiées d’Alexandrie en Egypte ? C’est le Mossad. Un groupe de touristes visitant Louxor est massacré de sang froid par des terroristes en novembre 1997 ? Le Mossad encore bien sûr. Le raisonnement est le suivant : les Musulmans sont bien incapables d’un tel crime contraire à leur religion ; qui a intérêt à ce massacre, qui va faire un tort inestimable au tourisme égyptien ? Les Israéliens, voyons ! D’ailleurs le bruit court qu’un groupe de touristes israéliens qui devaient visiter Louxor ce jour là a annulé son excursion au dernier moment . C’est qu’ils ont été prévenus. (Une information par ailleurs tout à fait dénuée de fondement) Donc, c’est le Mossad qui a fait le coup. Le lecteur ne peut pas imaginer à quel point cette illusion était répandue au sein des Egyptiens. Nous avons été confrontés à un problème de même type après la catastrophe du vol 990 d’Egyptair en 1999. Selon la conclusion des enquêteurs américains, le second pilote aurait de façon délibérée plongé son appareil dans la mer. Une conclusion rejetée par les Egyptiens, qui soutenaient alors qu’un bon musulman ne peut commettre suicide et encore moins en entraînant des innocents dans sa mort. ( Une argumentation qui a perdu beaucoup de son poids depuis le 11 septembre 2001 et la destruction des tours jumelles de Manhattan par des pilotes musulmans kamikases - au nombre desquels se trouvaient plusieurs égyptiens ). Là encore, la main du Mossad est vue dans la catastrophe. Un livre sera même écrit, reprenant la plupart des accusations circulant dans les bazars. Les événements de seraient déroulés de la façon suivante : des agents du Mossad, infiltrés dans la tour de contrôle ( !) aiguillent l’avion sur une trajectoire erronée qui le fait entrer dans une zone de tirs de missiles de la marine américaine ; l’avion est atteint et s’abîme dans l’océan. Un sous marin israélien tapi au fond de l’eau l’attendait ; deux hommes grenouille en sortent et se dirigent vers le cockpit de l’appareil. Ils enlèvent rapidement les boîtes noires et les remplacent par deux nouvelles boîtes préparées à l’avance….. Et les gens y croient. Les exemples que j’ai donnés ci-dessus ont été choisis avec soin : il ne s’agit pas de questions touchant à la politique israélienne ou au conflit en général mais bien d’accusations graves s’adressant à la société israélienne dans son ensemble. Ce qui est navrant, c’est la réaction de nos collègues les diplomates étrangers. D’une part, ils ne sont généralement pas au courant ; de l’autre, quand on leur en parle ils trouvent ça très drôle et éclatent de rire. Je reconnais que certaines de ces inventions sont savoureuses à souhait. Seulement il faut bien comprendre ce qu’elles cachent. Et comprendre surtout que les Egyptiens, eux, ne rient pas. Certains y croient dur comme fer, d’autres n’en sont pas si sûrs mais estiment que c’est fort possible. Rares, très rares sont ceux qui sont prêts à dire en public que ce sont là des bêtises qui ne méritent pas même qu’on en discute. Je crois que pendant tout mon séjour je n’en ai rencontré que deux ou trois. Raouf, un journaliste qui ne se laisse pas aveuglé par ses positions nettement pro-palestiniennes et anti-israéliennes et Fouad, éditeur et publiciste qui ne se fait depuis longtemps plus d’illusions sur grand chose. Reste à savoir maintenant si l’antisémitisme de la presse vient de cette présentation de la société israélienne ou bien si c’est le contraire, un antisémitisme solidement enraciné permettant de tout croire en ce qui concerne le peuple juif. On trouve sur les rayons des libraires des dizaines de titres sur les Juifs et le judaïsme et de nouveaux ouvrages paraissent chaque année. Nul besoin de connaître l’arabe pour s’en apercevoir. Etoiles de David dégoulinants de sang, répugnants personnages rappelant les pires excès de la presse nazie figurent sur les couvertures de ces livres. Les « Protocoles des Sages de Sion », célèbre faux fabriqué par les services de propagande du ministère de l’intérieur de la Russie tsariste, sont constamment réédités avec de longues introductions expliquant combien il est nécessaire de les lire pour pouvoir se défendre contre l’hydre sioniste . Un universitaire de seconde zone a accédé à la gloire en publiant une effarante encyclopédie du judaïsme en six gros volumes. Ses extravagantes élucubrations lui ont valu de nombreux prix et un séminaire lui a été consacré à l’université du Caire. Les deux diplomates israéliens invités officiellement à cette occasion ont été refoulés à l’entrée, « les étudiants égyptiens se refusant à accepter leur présence. » Une des choses qui frappent le plus dans ce domaine c’est l’attitude très ambivalente des Egyptiens concernant Hitler, personnalité en général très admirée, et l’holocauste. Il est rarissime de voir ce terme utilisé dans la presse sans l’épithète obligée « soi-disant ». La Gazette égyptienne, toujours elle, accuse ainsi les Juifs d’exercer un chantage sur le monde « à la suite des soi-disant persécutions subies aux mains des nazis » ( 6/8/1997) et ce thème revient constamment dans la presse égyptienne. Samir Ragab appelle d’ailleurs dans un éditorial publié dans tous les journaux de son groupe « à un boycott des trop nombreuses banques contrôlées par les Juifs de par le monde. » Un article de fond consacré à Moïse écrit que les membres de la tribu de Judah « suivaient le chemin du diable ….et pratiquaient le commerce et la récolte de l’argent ….. Ils constituaient une menace pour la sécurité de l’Egypte. » (Article reproduit par la Gazette, 12/9/95). Et notre « ami » Samir Ragab résume la situation dans un autre de ses éditoriaux. « Il est bien connu que les Juifs sont des gens radins qui ont un besoin obsessionnel d’acquérir des biens. Aussi lorsqu’on les force à rendre leurs droits aux propriétaires légitimes, ils se mettent à pleurer et à se lamenter comme s’ils avaient été atteints par la foudre. » (Gazette, 23/10/1998). D’ailleurs s’ils ont été victimes de pogroms et de persécutions, c’est sans doute à cause de l’étalage outrancier de leur opulence (Gazette, 17/2/2001). Et Hitler ? Et bien Hitler c’est un héros et un grand patriote. Un général égyptien né en 1940 porte son nom, son jeune frère s’appelle Mussolini. Et plus d’une fois les Egyptiens évoquent avec nostalgie le combat d’Hitler contre les Juifs. « Et si on clonait un nouvel Hitler ? » demande la Gazette (19/8/2001).Tandis que dans « Al Akhbar », quotidien appartenant au groupe du même nom et donc appartenant comme nous l’avons vu au gouvernement, Ahmed Ragab (non, ce n’est pas un parent de notre Samir) un des ténors du journalisme écrivait le 24 avril 2001 : « Merci à feu Hitler pour avoir vengé avant l’heure les Palestiniens des criminels les plus haineux de la terre, et si nous avons quelque chose à lui reprocher, c’est que sa vengeance n’a pas été suffisante. » . L’ambassade d’Israël a protesté, l’affaire fut portée devant les Nations Unies et la semaine suivante, Monsieur Ahmed Ragab publiait à nouveau, au même endroit, le même texte sous le tire « Nous répétons ». Deux mois plus tard il se vit décerner le prix de la presse égyptienne pour l’année 2001. Et nos chers collègues les diplomates étrangers dans tout cela, direz-vous. Comment ont-ils réagi ? Ils n’ont pas réagi, parce qu’ils ne lisent en grande majorité pas la presse locale. Ils disposent d’équipes de traducteurs locaux qui font chaque jour à leur intention le tri des informations importantes. Le billet d’Ahmed Ragab n’a pas du leur paraître important, puisque plusieurs d’entre eux n’en ont appris l’existence que lorsqu’une organisation juive a pris l’initiative de prendre une pleine page de l’International Herald Tribune pour publier ce billet avec sa protestation. Là encore, personne n’a rien fait. De façon générale nous l’avons vu, les diplomates étrangers ne veulent pas se lancer dans une confrontation avec les Egyptiens sur un sujet qui, au fond, ne les touche pas vraiment. L’épouse d’un haut diplomate américain se justifie autrement : « Nous ne pouvons rien y changer alors pourquoi faire attention à ce genre d’articles ? » Personnellement je pense que c’est une très grave erreur. En effet, les Egyptiens ne peuvent pas ne pas constater que les pays européens et même l’Amérique ne réagissent pas à leurs attaques contre Israël et en particulier aux accusations invraisemblables portées contre ce pays. Ils en tirent une conclusion toute logique : ce manque de réaction signifie que les accusations sont bien fondées. D’où un corollaire : si les Israéliens sont coupables de tous les crimes dont la presse égyptienne les accuse, pourquoi l’Europe et l’Amérique ne font-elles rien pour y mettre fin ? C’est qu’elles sont complices…Donc coupables elles aussi. En dernière analyse, cette passivité somme toute assez lâche des Occidentaux revient les frapper comme un véritable boomerang. Mais ce n’est pas tout. Dans cette ambiance de plus en plus empoisonnée, il est difficile d’être un Israélien au Caire ; difficile aussi pour un Egyptien de fréquenter les Israéliens. Le syndicat des médecins menace ceux de ses membres qui se seraient rendus en Israël en cachette pour effectuer une visite professionnelle d’expulsion ; c’est d’ailleurs le sort réservé au publiciste et écrivain Ali Salem, coupable d’avoir voulu aller voir de ses propres yeux ce qui se passait de l’autre côté de la frontière. Petit à petit, c’est une véritable paranoïa qui se développe en Egypte. Le mot n’est pas trop fort. On voit la sinistre influence d’Israël partout. Il y aurait une étoile de David cachée dans le sigle de la lessive Ariel. Les petits personnages du jeu Pokémon renfermeraient des messages sionistes cryptés ; le mot « Pokémon » lui même signifierait « Je suis Juif » en japonais. Les Japonais tout surpris durent démentir à grand renfort de conférences de presse dans tous les pays arabes, sans toujours parvenir à convaincre. Le musicien et compositeur français Jean-Michel Jarre, avait été chargé de préparer à la fin de l’année 1999 le grand spectacle télévisé qui allait clore le vingtième siècle et ouvrir le vingt-et-unième siècle aux pieds des Pyramides . Devant le déferlement des rumeurs et l’indignation générale à voir cette manifestation culturelle confiée – oh horreur ! à un Juif, Le ministre égyptien de la culture Farouk Hosny, peu suspect de sympathie pour Israël, se voit contraint de déclarer publiquement à la télévision qu’après vérification, il peut affirmer que l’artiste n’est pas Juif.. Là encore, personne ne proteste et surtout pas les Français. Jean-Michel Jarre doit tout de même accepter de supprimer une partie de son programme dont le clou du spectacle où d’aucuns ont cru voir la transmission d’un message sioniste subliminal… Cette paranoïa a parfois des conséquences graves pour l’Egypte. Lorsque le gouvernement de ce pays décide de faire passer le secteur public à la semaine de cinq jours, il se heurte à un problème insurmontable : quel jour choisir ? Le jour de congé traditionnel, c’est le vendredi. Il serait donc normal de lui ajouter le samedi, d’autant que ce jour est chômé dans les administrations de la plupart des pays. Seulement voilà, le samedi, c’est le jour de repos non seulement des Juifs, mais encore de l’Etat d’Israël. Comment l’Egypte pourrait-elle l’adopter ? Ne serait-ce pas une victoire du sionisme ? C’est tout à fait impossible ! Mais d’un autre côté, prendre le jeudi, c ‘est se couper du monde pendant quatre jours – jeudi et vendredi étant alors chômés en Egypte alors que le reste du monde ne travaille pas le samedi et le dimanche. C’est pourtant la solution qui a été adoptée pour la majorité des ministères…. De fortes pressions ont été exercées sur certaines compagnies étrangères, pétrolières notamment, qui ne travaillaient déjà que cinq jours – du dimanche au jeudi - pour qu’elles remplacent le samedi par le vendredi. Les compagnies ont refusé, ne voulant pas se couper de leurs sièges pendant quatre jours comme on l’a vu plus haut. Autre élément de paranoïa, les pyramides. Depuis la phrase malheureuse de Menahem Begin ayant déclaré par erreur : « Voici les pyramides qu’ont bâties nos ancêtres » les Egyptiens sont à l’affût de toute atteinte, réelle ou imaginaire, à leurs plus célèbres monuments. Israël fait-elle une exposition sur la paix, prenant comme symbole un rameau d’olivier, une colombe et une pyramide ? C’est une maneuvre sournoise pour ravir aux Egyptiens le fruit du génie de leurs ancêtres. Un chercheur italien ou un ingénieur anglais plus ou moins farfelus émettent-ils la théorie que les dites pyramides ont été construites par des gens venus d’ailleurs ? On leur recherche immédiatement des antécédents juifs ou on les accuse d’être à la solde du Mossad. Un accord conclu entre une respectable université européenne et le gouvernement égyptien prévoyait l’examen d’un squelette trouvé dans le sud de l’Egypte dans le laboratoire de ladite université. Au dernier moment « Amn el Dawla », les services de la sécurité de l’Etat, s’y sont opposés au motif que certains chercheurs auraient prétendu trouver dans l’antique squelette des éléments d’.ADN indiquant qu’il avait appartenu à un Juif…. Deux points pour terminer : j’aurais pu citer des centaines, des milliers de textes publiés pendant les cinq années de ce second séjour ou mentionner les attaques et les accusations dont étaient victimes quotidiennement les dirigeants israéliens – Benjamin Nétanyahu ; Shimon Pérés, Ehud Barak ou Ariel Sharon. Je ne l’ai pas fait car ce n’est pas mon propos. Je voulais montrer un phénomène qui dépasse largement la politique. Un phénomène qui empoisonne littéralement l’atmosphère. Il ne cesse de prendre de l’ampleur et semble se nourrir de lui-mêle. . Et si j’ai beaucoup parlé de la Gazette, c’est que c’est à travers les colonnes de ce journal que j’ai découvert la plupart des textes cités, alors même que dans la majorité des cas ces textes ne faisaient que traduire en les résumant des articles parus dans la presse égyptienne en arabe. Tout de même, c’est bien le rédacteur en chef du journal qui fait le tri et qui décide de ce qui sera en fin de compte retenu. En conclusion, je voudrais évoquer un fait-divers apparemment sans importance relevé au passage dans un quotidien égyptien. Trois adolescents d’un village de la région du Delta du Nil, des chenapans bien connus de la police locale, avaient échoué aux examens de la fin du secondaire. Ils avaient mal supporté cet échec, leur fermant la porte de l’université et faisant d’eux la risée de leurs camarades plus chanceux. Ils décidèrent donc de se venger. Contre qui ? Contre leur école naturellement : dans leur raisonnement, cette dernière portait seule la responsabilité de leur échec. Mais comment se venger ? En pleine nuit, nos trois conspirateurs s’introduisent dans les locaux déserts. Le matin, lorsque les élèves prirent place dans la cour pour déclamer selon l’usage l’hymne national tandis que le drapeau se déployait fièrement, un cri d’horreur s’échappa de centaines de poitrines ; le drapeau qui montait lentement dans le ciel était le drapeau bleu et blanc avec la menaçante étoile de David de l’Etat d’Israël. Les élèves recalés n’avaient pas trouvé meilleur moyen de déshonorer leur école que de remplacer le drapeau égyptien par le sinistre emblème de l’entité sioniste….

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